La scène pour le moins spectaculaire s’est déroulée cet après-midi du 26 Octobre 2021 à Douala en plein cœur du quartier Akwa, devant l’entrée de Canal 2 International. Les courtes vidéos disponibles sur les pages Facebook et Youtube de la chaîne de télévision « toujours plus près de vous » et sur d’autres pages, montrent une partie de la rixe entre le chanteur Camerounais facilement reconnaissable, et les personnes venues l’interpeler.
On y voit Mr Shyne, visiblement hors de lui, échanger des mots à haute voix avec ses vis-à-vis, sous les regards étonnés des passants. Dans un autre extrait vidéo posté par un autre internaute, on entend dans la confusion les badauds dire « ils ont sorti l’arme, ils ont sorti l’arme. » Puis sur une autre vidéo, s’adressant au reporter Yasser Tanon de Canal 2 descendu pour s’enquérir de la situation, on entend l’artiste dire entre autres « Yasser, je n’ai rien fait de mal. Je leur ai demandé de me montrer l’ordre de mission, ils ne me l’ont pas montré. On était en train de casser ma vitre, c’est pour ça que j’ai reculé. » En essayant de recouper, nous apprenons que l’artiste est arrivé sur cette rue quelques minutes auparavant, à bord de son véhicule, une Toyota Corolla Avensis modèle 2005, de couleur grise. Lui et ses deux compagnons présents dans la voiture sont rejoints par un groupe de 4 hommes en civil, qui engagent avec Mr Shyne pendant une quarantaine de minutes, un conciliabule qui va vite s’échauffer. Un autre véhicule arrive, de couleur rouge, d’autres hommes en sortent et se joignent à ceux qui entourent déjà le véhicule du chanteur. Le calme ne va pas non plus régner, et l’artiste essayera de faire une marche arrière de la voiture, et c’est à ce moment-là que l’un de ses interlocuteurs, vraisemblablement un policier en civil – ce qu’on appelle au Cameroun un anti-gang, sort son arme, un revolver, question de dissuader. Puis l’artiste s’arrête, lui et les autres occupants de son véhicule sortent, et la dispute se poursuit de plus belle. Mr Shyne va recevoir une gifle, et quelques minutes après il va être embarqué à bord du véhicule rouge, pour une destination inconnue.
Mr Shyne est un artiste chanteur Camerounais d’afro-rnb révélé il y a quelques années par le label War Machine à travers notamment le single A Jamais en 2019 en feat avec Charlotte Dipanda. Le titre déjà regardé 10 millions de fois sur Youtube, est nommé d’ailleurs aux Canal 2’Or acte 13 dans la catégorie Chanson Populaire. Il a récemment sorti les singles Jaloux avec l’ivoirien Venom Cascadeur, et Mado, disponibles sur toutes les plateformes. Certains internautes estiment qu’il s’agirait d’une action scénarisée pour générer du buzz dans l’actualité de l’artiste. Mais on se demande bien comment une mise en scène de ce type pourrait se faire avec des armes à feu, vu le contexte sécuritaire tendu dans le pays. Pour l’heure on est loin de savoir les raisons de cette interpellation. Nous y reviendrons.
Le public ouagalais a chaudement applaudi à la révélation de son nom lors de la proclamation des résultats ce 18 octobre au cours du show final de l’édition 2025 des REMA, les Rencontres Musicales Africaines. L’artiste Camerounais 2B Francky venait ainsi de gagner son premier prix international. Déjà lauréat du prix Goethe Découvertes dans la catégorie son en 2024, l’artiste a donné une prestation plus qu’électrique le 17 octobre sur le plateau showcases de l’évènement. Qualifié de « véritable bête de scène » par BF1 la télévision privée burkinabè N°1 qui retransmettait l’évènement sur internet, 2B Francky a clairement impressionné, avec sa captivante présence scénique, où son Mvet, instrument traditionnel d’Afrique Centrale, ajoute du charisme à sa tenue aux airs de super héros.
Mais, ce prix, de quoi s’agit-il ?
Depuis deux ans, les REMA avaient initié en partenariat avec l’Ambassade du Brésil à Ouagadougou, le prix Brésil Jeunes Talents aux REMA, qui récompense la performance des artistes en phase de décollage de carrière. Après le Sénégal en 2023 et le Kenya en 2024, 2B Francky du Cameroun repart avec le précieux sésame, accompagné d’une dotation financière de 1000 dollars US offerte par l’Etat du Brésil. Pour le jury, présidé par les journalistes malien et ivoirien Mory Touré et Seydou Koné, ce prix récompense « une belle prestation mélangeant un savant dosage de modernité et de tradition » selon les mots de Mory, qui a rappelé au passage que l’appel à candidatures avait attiré plus de 200 artistes, dont dix sélectionnés ont présenté leurs spectacles lors de cette septième édition des REMA : Kid Boss, Franky FP, Phanuel et Joe Le Soldat du Burkina, Lerie Sankofa et Zoh Cataleya de la Côte d’Ivoire, Sahad du Sénégal, Sahel Roots du Mali, Kadeux du Tchad et 2B Francky du Cameroun.
Qui est 2B Francky ?
« 2B Francky se présente comme un lien intergénérationnel, cherchant à perpétuer l’immense héritage culturel des Fang Beti en mettant en lumière le « mvet », un instrument ancestral de ce peuple. Il tente la fusion de cet instrument avec les sonorités plus modernes, qu’il s’agisse du Bikutsi ou de l’afrobeat, le tout accompagné de paroles inspirées de la langue Eton, ainsi que des légendes Beti« . C’est en ces termes que le Goethe Institut parle de l’artiste qui a déjà écumé nombre de festivals et salons au Cameroun, comme le DOMAF, le Douala Music Art Festival, à Douala en 2024.
A propos des REMA
A l’initiative de l’artiste burkinabè Alif Naaba et de la société de production La Cour de Naaba, les rencontres musicales africaines (REMA) se présentent comme un événement musical annuel de premier plan qui se tient chaque année au Burkina Faso. Organisés sous la forme d’un salon, ces rencontres visent à rassembler des professionnels de la musique pour échanger sur des thèmes cruciaux liés à l’économie musicale et à la professionnalisation des métiers de la musique sur le continent. Avec au menu, des panels de talk sur des sujets aux enjeux actuels et futurs, des ateliers de partage d’expérience, les concerts dénommés REMA Play avec les plus grands noms de la scène panafricaine, les showcases avec un prix à la clé, ainsi gagné par 2B Francky.
En 2022, elle avait été la gagnante de The Voice Kids Afrique diffusée sur Vox Africa. Le 06 septembre 2025, la très jeune et talentueuse chanteuse d’origine camerounaise a une fois de plus ébloui le public, cette fois-ci sur TF1 en France, avec son impressionnante interprétation du titre « Listen » de Beyoncé, lors des épreuves d’audition à l’aveugle de The Voice Kids France. Tous les coaches se sont alors retournés et elle a finalement opté pour le coach Soprano. Ce samedi 20 septembre, elle a une fois de plus tout cassé en hissant sa performance au dessus du lot des quatre dont elle faisait partie, pour l’épreuve de demie finale dans la team Soprano, dans une interprétation collective d’un titre de NEJ’, invitée par leur coach. Si tout le monde a apprécié l’envolée vocale de Miriam sur la fin de la chanson, ce qui a été un point de différenciation selon les autres coaches, Soprano le lui a reproché, soulignant le fait que ce n’était pas prévu, et qu’elle doit apprendre à respecter les structures recommandées par les coaches. Heureusement ce léger grief n’a pas empêché Soprano de choisir Miriam Ebah Obama pour aller à la finale, qu’elle compte déjà convertir en victoire.
« C’est l’histoire d’un lion, d’une panthère et d’un éléphant, qui ont fait l’amour à l’instrumental » pour « faire jouir leurs fans » et « remettre les pendules à l’heure », comme Xzafrane le pitche lui-même dans son couplet d’ouverture. Xzafrane du Cameroun, Rodzeng du Gabon et Defty de la Côte d’Ivoire, trois mcs connus pour leur amour pour le rap à texte, amènent sur la scène urbaine francophone ce nouveau single aussi lourd que le marteau de « Thor ». Un titre puissant, aux contours sonores épiques, ambiance voulue, pour traduire leur prétention à mener la barque dans les eaux troubles du rap. Dès les premières secondes, Thor capte l’attention. La prod, lourde à souhait, signée Igot Beatz, n’essaie pas juste de faire danser, mais à imposer une ambiance, celle du message que viennent dérouler les deux fauves d’Afrique Centrale et le pachyderme ouest-africain. Thor évoque immédiatement la figure mythologique notamment véhiculée par les fables cinéma de Marvel — symbole de force, de foudre, de puissance invincible. Et le clip de Rodrigue Mbida qui voyage dans les esthétiques urbaines de Yaoundé, Libreville et Abidjan, veut traduire l’esprit du titre.
Toujours plus de place pour le message
L’usage du nom « Thor » n’est pas anodin : il sert de métaphore à la résistance, à la capacité à surmonter les obstacles. Defty et Rodzeng apportent chacun leur grain de vérité, leurs contrastes dans le flow, rendant le récit plus riche. Les paroles alternent entre la revendication (« je veux qu’on m’écoute », ou des assertions qui refusent la faiblesse) et la prise de conscience des luttes vécues. Il y a une quête de reconnaissance, non seulement pour soi-même, mais aussi pour une communauté. Le tout est exprimé avec une énergie brute, sans fard. Le morceau se veut même dense, voire touffu à certains endroits. Pourtant le titre, par l’animation visuelle proposée dans le clip et par la vibe hip hop globale, se veut quand même dansant. Ce choix esthétique de densité revendique-t-il leur style traditionnel hardcore qui donne toute la place aux textes, quitte à faire trop rempli, à contre-courant d’une époque où les titres rap à la mode sont dépouillés et mélodieux ? Le leitmotiv semble est inchangé pour les trois kickeurs en tout cas : rester authentiques quoi qu’il en coûte, rester déterminés et « ramener l’or tant qu’on n’est pas rouillés ».